A peine majeure, Marie se retrouve livrée à elle-même face à la mort de son premier enfant, un petit garçon mort-né.

Quarante ans plus tard, elle se livre pour Zétwal An Syèl.

  • Pouvez-vous nous raconter un peu votre histoire ?

Le jour de mon accouchement je suis arrivée et on m’a fait attendre parce qu’il y avait déjà quelqu’un qui accouchait et à l’époque il n’y avait qu’une salle d’accouchement. J’ai accouché rapidement mais on m’a dit que mon enfant avait “bu de l’eau au passage”. Je l’ai vu mort né, j’avais déjà trouvé un prénom pour lui « Guy-Edouard ». 

A mon époque il n’y avait pas d’enterrement, pas de veillée, rien. Donc je ne sais pas où est mon fils, s’ il est dans un sac, incinéré, dans un cercueil. Mais je pense qu’il est dans une partie du cimetière du Lamentin où il y a un caveau pour les enfants morts nés. 

  • A combien de mois de grossesse avez-vous perdu votre petit garçon ?

J’étais à terme. Je n’avais pas de problème de santé et lui non plus. On ne m’a jamais donné d’explication. On m’a juste dit qu’il a bu de l’eau lors de l’accouchement.

  • Est-ce que vous avez été prise en charge d’un point de vue psychologique ? 

Non. Je n’ai rien eu. Je me suis refaite toute seule. Ils auraient dû agir comme pour l’époque actuelle où il y a veillée, obseque, des prises en charges, etc…

  • Quel est votre sentiment face à cette épreuve ?

C’était tabou à l’époque, en plus j’avais 18 ans. Donc je ne pouvais pas parler ni à mes parents ni à mon entourage. C’était ma première grossesse. Je n’ai pas eu peur de faire d’autres enfants . D’ailleurs j’en ai eu 5 autres. 

  • Et maintenant ? Après plus de quarante ans? 

J’ai eu d’autres d’autres enfants qui ont compensé la perte. C’est un petit ange qui veille sur nous. 

  • Quels conseils donneriez-vous à une jeune femme, ou un couple qui vit cette épreuve ?

Comme je suis chrétienne, si le Seigneur a pris c’est que le Seigneur sait ce qu’il fait. Le Seigneur va vous donner d’autres grâces. C’est facile à dire et pas facile à vivre. Mais il faut accepter. C’est sûr que c’est une cicatrice qui va rester à vie mais la venue d’autres enfants va combler ce vide. Il faut aussi être bien entouré.

Qu’est-ce que vous pensez de l’association ? 

Il était temps qu’une association comme ça voit le jour en Martinique ! Ça permet aux femmes qui ont perdu leur enfant d’être accompagnées par des personnes qui les comprennent.

Nous remercions Marie de nous avoir accordé cette interview.

*Le prénom a été modifié. Les images utilisées sont des images d’illustration. Les propos de Marie ont été recueillis par Maïlys MORIOT.

© Photo de Vladimir Soares sur Unsplash

 

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